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La route vers Gaza

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2009-03-30 16:07:59

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La route vers Gaza



:Sous le choc
La violence de l’agression sur Gaza a suscité beaucoup d’émoi chez les musulmans. Le choc des images, insupportables et passées en boucle, ne pouvait laisser les consciences tranquilles partout dans le monde. On avait l’impression qu’un seuil a été franchi par l’armée d’occupation.

Dès le deuxième jour, le 28 décembre 2008, j’ai commencé à chercher le moyen de partir vers Gaza. J’ai travaillé dans le milieu associatif et humanitaire à Paris, depuis une dizaine d’années : de l’Afghanistan aux Comores et de l’Ethiopie à la Cisjordanie. Le travail au sein d’ONG internationales comme Médecins Sans frontières ou Médecins du Monde m’a permis d’avoir des amis dans le monde humanitaire français. Le militantisme pro palestinien m’a approché d’acteurs dévoués à ces causes comme la sénatrice d’origine marocaine des Verts, Mme Alima Boumediene ou le cinéaste Samir Abdallah.
Ce sont ces militants d’horizons divers qui ont constitué, à Paris, le Collectif Urgence Gaza, que j’ai pu joindre avec l’Association Médecins du Maroc, créée avec des amis en 2003.
Je faisais partie du deuxième groupe de médecins, constitué de quatre praticiens.
Dr Manar, médecin égyptienne nous a organisé un rendez- vous au siège de l’Union des Médecins Arabes.
Dès notre arrivée, on s’est adressé d’abord à l’ambassade de France en Egypte pour nous enregistrer et demander une autorisation pour nous rendre à Gaza et ensuite vers le siège de l’Union des Médecins Arabes qui nous ont reçu aimablement, d’abord au Caire puis à Al Arish et facilité notre déplacement jusqu’au poste frontière de Rafah, devenu tristement célèbre.


Sur le seuil de Rafah
Face à la police des frontières, il nous fallait un accord des autorités françaises. C’est là où commencent les va-et-vient entre les responsables français; sans le dire, on nous faisait poireauter. Mes amis entreprenaient de passer des coups de fil un peu partout en France, jusqu’à faire des interventions auprès du ministère des Affaires Etrangères où s’est créée pour l’occasion, une cellule de crise.

Les deux jours passés devant le poste frontière de Rafah, attendant le papier de l’ambassade, n’étaient pas dénués d’intérêts. Tout d’abord, cela nous a fait vivre ne serait ce qu’une infime partie de ce que les palestiniens perdurent des journées durant, en attendant un passage vers un sens ou vers l’autre. Et d’assister au défilé des camions d’aides, leurs difficultés à passer et leurs déboires s’ils transportaient autre chose que les médicaments. Une fixation est faite sur les médications, comme si le fait de boire une eau saine, manger un peu de blé ou de riz et se vêtir chaudement n’étaient pas des nécessités dans ce climat de guerre. Mais le temps n’était pas aux explications. Il y avait des ordres et les policiers des frontières les appliquaient sans état d’âme !!

Une fois la demande de l’ambassade de France au ministère des Affaires Etrangères égyptiennes, de nous laisser passer vers Gaza, en main, on a pu finalement passer de l’autre côté, non sans avoir certifié sur papier libre qu’on assume les conséquences d’aller vers une zone dangereuse. De l’autre côté l’accueil a été plutôt amical. Vérification des passeports et de la profession par des policiers palestiniens en civil.
On a été mis dans une ambulance, direction l’hôpital de Khan Younes.

Nous nous sommes installés à l’hôpital du Croissant Rouge Palestinien, bien accueillis par le corps médical et les administrateurs. Le maximum de l’attaque et les blessés étaient au nord, vers Gaza city et ses alentours. J’ai commencé à exercer dans l’hôpital Mère- Enfant de Nacer (du nom du Raïs égyptien), et faire des consultations dans l’hôpital du Croissant Rouge Palestinien. En réalité, le nombre de médecins était suffisant et les palestiniens se sont organisés pour affronter les urgences. Cependant, ils sont touchés par l’arrivée de confrères et toutes les personnes qui se sont déplacées pour les soutenir, en ces temps si difficiles.

La plupart des délégations de médecins européens, voire américains et même sud- africains que j’ai pu croiser durant mon séjour à Gaza, étaient composées de musulmans. Les ONG habituelles ont eu du mal à trouver leurs places, du moins au début. Mention faite pour les médecins norvégiens qui ont été très tôt dans le centre hospitalier Achifa à Gaza city, et qui ont fait un travail remarquable, aussi bien en soins, qu’en témoignages. Leurs témoignages ont eu un grand effet en Norvège.
Les premiers médecins égyptiens qui ont accouru vers le poste frontière de Rafah, resté fermé au début, ont dû emprunter la voie des tunnels pour arriver à Gaza. Ainsi, on m’a parlé d’un anesthésiste qui a dû avancer en rampant 600 m dans un tunnel avant d’arriver à Gaza. Ce courage et cette volonté lui ont valu beaucoup d’admiration de la part du corps médical palestinien.

Apres le cessez-le-feu 
Le cessez-le-feu fut annoncé par l’agresseur suite à une mise en scène orchestrée à Washington et applaudie en Europe, juste avant le 20 janvier 2009 date de la cérémonie d’investiture du nouveau président américain.

Le retrait de l’armée nous a permis d’accéder vers le nord de Gaza. C’est le choc des destructions et des témoignages…
Les quartiers périphériques ont été rasés de façon méthodique. Les témoins nous racontaient comment les soldats procédaient. Après avoir encerclé une maison par les chars, les soldats capturent un palestinien, lui demandent de casser la porte, de réunir les habitants, les hommes d’un côté, les femmes et les enfants de l’autre, les compter. Ensuite faire des ouvertures entre les murs des pièces attenantes et revenir vers les blindés. La deuxième étape consiste à envoyer un chien muni d’une caméra, d’un écouteur et d’un gilet pare balles. Le chien fait un tour dans la maison en suivant les indications transmises via l’écouteur ! On vérifie la véracité des dires du palestinien pour commencer la troisième étape, qui consiste à évacuer la maison de ses occupants et placer des mines afin de raser complètement l’habitation. Si des tirs émanent de la maison ou si le chien est blessé, alors c’est une avalanche de tirs à bout portant par les chars sur la maison avec ses occupants.
L’histoire la plus sordide est celle qui a été vécue par la famille Samoini à Hay Zeitoun. Suite à l’explosion d’une bombonne lors du passage des blindés, le quartier a été encerclé. Les soldats se sont appliqués à tirer de tous les côtés et avec toutes les armes qui étaient en leur possession, sur la maison suspecte. Une fois la famille réunie, trente huit personnes seront exécutées : hommes, femmes et enfants. Un massacre.

Mes visites des quartiers sinistrés m’ont énormément marqué. Chaque soir, je rentrais exténué. Rien n’a été épargné, les arbres ont été arrachés, les animaux exécutés à bout portant par des blindés ou des mitraillettes, les champs dévastés par les chars, même les morts n’ont pas été laissés en paix dans le cimetière. Les mosquées ont été détruites ou abîmées. Il nous paraissait qu’il y avait chez certains pilotes, un malin plaisir à viser les minarets. Les hôpitaux n’ont pas été en reste, ainsi que les ambulances et les écoles de l’UNRWA.


De la liberté
Depuis une dizaine d’années que je travaille dans les ONG de solidarité internationale, que je voyage dans des parties troubles ou sinistrées, je rencontre peu de musulmans sur le terrain. Non pas qu’ils soient insensibles aux conditions difficiles des personnes, mais simplement, ils sont pris par le quotidien ou ce qu’appelle Stuart Mill dans son livre ‘’ De la liberté ‘’, ils s’occupent d’abord des besoins primaires comme la nourriture, assurer un logement et une éducation à leurs enfants et leurs permettre de se soigner. Prendre de son temps, de son énergie, de son argent et de son savoir pour aller vers l’autre et sans contrepartie immédiate, fait partie de la réalisation d’un besoin secondaire, comme s’organiser en associations caritatives, syndicales ou politiques, se cultiver et se surpasser. Et c’est justement ce qui a motivé les dizaines de médecins musulmans à tout laisser (hôpitaux, cabinets, familles, enfants, argent…) et à vaincre leurs phobies pour s’aventurer dans une zone de guerre !! Les autres intellectuels ou les élites n’étaient pas en reste, et chacun souhaitait faire quelque chose pour les palestiniens de Gaza.
Tout le monde a ressenti une profonde humiliation. Même l’élite arabe acculturée et qui ne jure que par l’Occident s’est trouvée désorientée.
Voilà le monde civilisé, moderne, démocrate et bien pensant. Les donneurs de leçons, apôtres des droits de l’homme et des libertés, ne bougent pas le petit doigt face aux exactions d’une force militaire occupante et destructrice. Une mise en scène occidentale qui ne cache plus son visage et une faiblesse régionale humiliante pour les arabes et les musulmans.
Nous avons du mal à interroger l’histoire, surtout récente, celle des colonisations et de la création d’un état sur la terre de Palestine. Malheureusement, on est pressé, on souhaite faire une lecture rapide et sans retour aux sources. Et justement, cette agression sur 1.5 million de palestiniens encerclés dans une bande, va peut être réveiller une partie des musulmans. Du moins, on ne peut que l’espérer !!

Certes, nous sommes nés dans le sous développement et l’humiliation, mais nous n’en sommes pas responsables !! Par contre, nous sommes responsables de nos pensées et de nos actes !!

Malgré tout ce que j’ai observé, les sinistrés que j’ai rencontrés restaient dignes. Personne ne demande quoi que se soit. Ils vous invitent à visiter ce qu’ils leur reste, comme maison ou à s’assoir sur les débris des leurs anciens abris. Ils vous racontent ce qui s’est passé. Une sorte de thérapie et de transmission du témoignage. Pas mal de fois, on a refusé la modeste aide matérielle qui m’a été confiée par des amis. J’ai dû utiliser des astuces pour leurs donner un petit quelque chose.
Cette dignité qu’on a perdu dans d’autres pays laisse le voyageur que je suis admiratif. Je me suis dit c’est ce peuple meurtri qui donne des leçons de courage et de résistance à tous les autres peuples musulmans.
Je ne savais plus qui avait vraiment besoin de l’autre. Les palestiniens de Gaza ou les peuples arabes ?

L’embargo des volontés ou la solidarité
Un mot revient souvent ces derniers temps, c’est celui de l’embargo des individus et de leurs volontés. Le temps passé sur place m’a permis de mesurer une partie des difficultés qu’endurent les palestiniens de Gaza.
Ils ont du mal à quitter le territoire, d’avoir l’électricité, le gaz, de trouver le nécessaire pour cuisiner et manger, voire s’habiller. Ils ont développé des astuces pour continuer à vivre. Comme mon ami Abdelhalim Abousamra du Centre Palestinien des Droits de l’Homme qui utilise une batterie avec quatre petites ampoules afin d’assurer une lumières pour ses enfants, afin qu’ils puissent continuer à étudier, et s’affranchir partiellement du courant électrique qui n’est disponible que trois heures par jour, de façon aléatoire. La batterie est rechargée par une énergie fournie par un tapis roulant de sport. Les cuisinières fonctionnent désormais au pétrole par un système inventé sur place afin de pallier la pénurie du gaz. Abou Nidal, notre chauffeur m’apprend que le gaz arrive d’Egypte vers l’état sioniste à prix modique, traité et mis dans des bonbonnes, son prix est multiplié par 40, et il n’est disponible que par la volonté des occupants.

A Gaza, la famille est soudée et tout le monde se supporte, et je dirais même s’aime et s’entraide, ce qui les éloigne de la culture de l’individualisme et de l’égoïsme.
L’esprit de la grande famille y résiste encore. On trouve dans les maisons trois voire quatre générations.
A Gaza, les acteurs médicaux que j’ai côtoyés traitent les patients avec respect et diligence. Il n’y a pas de corruption pour avoir ses droits, les services des urgences et les ambulances sont équipés en matériel et médicaments et les soignants font de leur mieux leur travail tout en respectant le patient, personne ne se permet de se servir pour ses besoins personnels !!

A Gaza, les femmes ont un niveau d’étude des plus élevés dans le monde arabe, travaillent souvent, ce qui ne les empêche pas d’avoir beaucoup d’enfants, de s’en occuper correctement et de veiller à leur réussite scolaire. Elles ont mis en échec tous les plans de limitation des naissances avec une moyenne annuelle de 6.2 enfants par femme. C’est leur façon de résister !!
Je ne sais plus qui est à plaindre, les palestiniens de Gaza, colonisés et encerclés dans un petit territoire, mais libres de toute aliénation malsaine, ou nous autres libres dans nos déplacements mais privés de liberté, car dépendants et aliénés ?
J’ai compris pourquoi les palestiniens de Gaza sont agressés si cruellement, c’est pour casser une volonté et faire fléchir une dignité. Les autres peuples qui n’ont ni l’une ni l’autre, il n’y a pas besoin de leur faire la guerre. Ils sont vaincus tous seuls.


‘’Gaza-strophe, le jour d’après ‘’
J’avais expliqué plus haut que mes collègues français ne sont restés en ma compagnie que deux jours, ensuite je suis resté en compagnie de mes collègues palestiniens. Le fait de rester indépendant d’un groupe, permet au voyageur que je suis de faire plus ample connaissance avec les différents acteurs que je côtoie. Petit à petit, j’ai eu ma place dans l’hôpital Al Amal à Khan Younes où je résidais. De jour en jour, j’ai eu des patientes qui venaient me voir, d’abord au niveau du personnel médical ensuite de bouche à oreille. Ma première intervention, quelque peu spécifique m’a fait un peu plus de notoriété. Les jours où je n’avais pas d’activités, j’accompagnais une délégation française conduite par la sénatrice des Verts d’origine marocaine Mme Alima Boumediene et les acteurs du Centre Palestinien des Droits Humains dans leurs visites sur le terrain et leurs recueils de témoignages. Ces visites étaient intenses. Samir Abdallah qui fait partie de la délégation française, a commencé son film qu’il a appelé dans un jeu de mot subtile ‘’Gaza-strophe, le jour d’après ‘’. L’ampleur des dégâts et l’intensité des témoignages nous sortaient de notre flegme. Plusieurs fois par jour, nos émotions sont mises à rude épreuve, entre la colère, le sentiment de faiblesse et d’incapacité ou encore une forte envie de pleurer. Quelques uns d’entre nous ne pouvaient plus retenir leurs larmes.

Un soir, j’au reçu un coup de fil de France d’un militant associatif de Paris. Il souhaitait venir à Gaza. Il m’a appris qu’il a pu rassembler une quantité de médicaments. Je lui ai appris que les médicaments, il y en avait peut être assez, mais il serait intéressant de penser à autre chose. Les images de début ont imprimé chez tout le monde l’idée de besoins en médecins et en médication. Ce qui est vrai mais seulement pour les premiers temps. Ensuite, il faut passer au secourisme proprement dit. Le logement, les aliments, l’eau potable, les habits chauds, les couvertures, etc.
Les palestiniens de Gaza ont perdu plus de cinq mille logements et vingt cinq mille familles sont sans toit. Combien j’ai été attristé de savoir qu’un bateau iranien qui contenait des shelters (maisons préfabriquées) n’a pas été autorisé à décharger son contenu à Al Arish !! Il a du repartir vers le Liban. Et jusqu’à présent les palestiniens sinistrés doivent trouver refuge chez leurs familles ou se contenter de tentes s’ils en trouvent.
Deux semaines après l’arrêt des bombardements, j’ai dû quitter mes nouveaux amis palestiniens pour reprendre le chemin du retour. J’ai été fatigué de mes longues journées, mais je ne pouvais leur dire qu’un au revoir. J’essayerai de revenir les voir, travailler, soigner et enseigner. Revenir pour partager les repas de Houmous, huile d’olive et fallafel, boire du thé et du café turc. Sentir ce vent doux des après-midis et la bonté des habitants de cette terre bénie. Parler avec des personnes plus proches de mes préoccupations et de mes espérances.

Je disais toujours à ma famille et mes amis qui me demandaient depuis de longues années pourquoi j’aimais tant voyager vers des zones de troubles, à chaque fois je leur répondais qu’il faut remettre les choses dans leurs dimensions. Ce ne sont pas les personnes que je vois et je soigne lors de mes voyages qui ont besoin de moi, c’est plutôt le contraire. Aller vers l’autre c’est une partie de toi que tu retrouves, et les gens dans leur milieu, même dans les pires situations comme on peut l’imaginer actuellement à Gaza, peuvent offrir un trésor d’humanité.




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